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Cambodge: d’immenses cités découvertes dans la jungle grâce au laser

Le temple de Beng Mealea au nord-est d'Angkor. Photo Krystel Maurice

Des cités médiévales inconnues jusqu’ici ont été découvertes dans la jungle cambodgienne grâce à la technologie du laser, a révélé une étude présentée ce lundi à la Royal Geographic Society de Londres par l’archéologue australien Damian Evans, dont l’équipe est basée à l’Ecole Française d’Extrême-Orient (EFEO) à Siem Reap.

Construites entre 900 et 1400 ans, ces villes s’étendaient sur des superficies immenses et certaines d’entre elles atteignaient la taille de  Phnom Penh.

Grâce à une technologie récente ayant recours au laser appelée Lidar, les archéologues avaient déjà mené une première campagne d’exploration en 2012  dans un secteur assez large situé autour des temples d’Angkor.
Fixé à un hélicoptère, le Lidar permet, grâce à des milliards d’impulsions laser, d’explorer sols et sous-sols à travers la jungle la plus épaisse, fournissant des données qui auraient pris des années de recherches sur le terrain.
Ces explorations avaient notamment permis d’obtenir d’excellentes images permettant de comprendre l’organisation de Mahendraparvata, une cité enfouie sous le sol du Mont Kulen, à une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Siem Reap. Fondée en 802 par Jayarvarman II, cette capitale dont on ignorait à peu près tout, est à l’origine de l’empire Khmer.

Fort de ce succès, un nouveau projet baptisé CALI (Cambodian Archaeological Lidar Initiative) a bénéficié en 2015 du soutien financier du Conseil européen de la recherche pour un montant de 1,5 million d’euros. Il est également soutenu par le gouvernement cambodgien et par de nombreuses universités et organisations internationales impliquées dans la recherche archéologique au Cambodge.
Les explorations réalisées en mars et avril 2015 ont cette fois-ci couvert une superficie beaucoup plus importante qu’en 2012. Quelque 1900 km2 du territoire cambodgien ont été survolés par le Lidar notamment les secteurs du temple de Beantey Chhmar, près de la frontière thaïlandaise, du Phnom Kulen, des temples de Beang Meala, de Preah Kanh Kompong Svay, de Sambor Prei Kuk et bien plus sud, la ville de Oudong ainsi que Choeung Ek, près de Phnom Penh.

Une cité à Preah Kanh Kompong Svay

Le temple de Preah Kanh Kompong Svay. Photo Krystel Maurice

Le temple de Preah Kanh Kompong Svay. Photo Krystel Maurice

Les relevés effectués ont révélé toute une série de découvertes que les chercheurs s’emploieront à approfondir dans les années à venir. Mais l’une des plus grandes surprises de l’équipe de Damian Evans a sans doute été de voir apparaître sur les écrans une vaste cité à proximité du temple de Preah Kanh Kompong Svay, un complexe religieux situé à 90 km à l’est de Siem Reap. Depuis des années, les archéologues battaient en vain la campagne pour en trouver la trace. Evans avait même fini par conclure qu’elle n’existait pas. Et, là, dans une pièce de l’EFEO, elle avait surgi comme une évidence devant les archéologues stupéfaits.

Autre surprise, la cité de Mahendraparvata située sur le Phnom Kulen était d’une taille bien plus importante que ce que les explorations de 2012, plus limitées, avaient révélé.

Les temples d’Angkor accueillent des millions de visiteurs chaque année. Mais pour l’heure, on ignore les raisons de la disparition de cet empire au début du 15e siècle. Bien des hypothèses ont été échafaudées. Parmi elles, celles d’une invasion siamoise qui aurait contraint les centaines de milliers d’habitants à s’enfuir précipitamment vers le sud. Si tel avait été le cas, le Lidar aurait repéré les traces de ces soudaines migrations humaines, souligne Damian Evans. Or, aucune ville n’a été détectée au sud d’Angkor.

Par ailleurs, tout comme à Angkor Wat, d’inexplicables formes géométriques linéaires ont été décelées dans les secteurs explorés. Serait-ce des jardins, comme le suggère Damian Evans?

Les résultats de toutes ces recherches seront divulgués dans les semaines et les mois à venir et devraient être publiés dans leur intégralité dans The Journal of Archaeological Science.

 

Krystel Maurice